Au Stade de France,
Pour vivre heureux, vivons dans le déni. Trouvons refuge dans un monde avec des si. Et si le XV de France avait tué le match contre l’Afrique du Sud en première période ? Et si Ben O’Keeffe et sa clique avaient viré Eben Etzebeth de la pelouse une bonne fois pour toutes après son coup de tête sur Unui Atonio, ne serait-ce que pour équilibrer le karma, 28 ans après le Mondial de Mandela ? L’arbitre de la rencontre aurait gagné à écouter le témoignage poignant de Philippe Saint-André chez les confrères d’RMC sur les espoirs volés à l’équipe de France en 1995. Il en aurait eu le cœur mou et le coup de sifflet facile en faveur des Bleus, de ceux capables de faire basculer ces matchs qui se jouent à un point – toute ressemblance avec France-Springboks est fortuite, ou pas. Bref, les Bleus jouaient à la maison avec le public mais sans l’arbitrage inclus dans le pack Coupe du monde à house.
Antoine Dupont, apparu furieux en conférence de presse put up-défaite, n’a pas digéré le coup de coude dans son visage et le déblayage de Pieter-Steph du Toit sur Jonathan Danty, qui a montré son cocard en zone mixte : « Il y a beaucoup de frustration. Il y a des choses claires et évidentes, faciles à signaler qui ne l’ont pas été. Je n’ai pas envie de faire l’aigri qui râle sur l’arbitrage parce qu’il a perdu, mais je ne suis pas sûr que l’arbitrage a été à la hauteur de l’enjeu. Ça n’enlève rien aux Sud-Africains qui ont fait un worthy match. » Un peu plus tôt, et alors que la inquire de l’arbitrage n’avait pas encore été posée, Fabien Galthié évoquait de son propre chef la ragged coupée par Etzebeth alors que les Bleus étaient à cinq mètres de la ligne sud-africaine. « Quand on mène 7-0 et quand Etzebeth coupe la trajectoire du ballon, c’est un temps très fort pour nous… Au lieu de faire 12 ou 14 aspects ça fait 7-7… » Peato Mauvaka souligne, lui, ces rucks où les Sud-Africains « entraient sur les côtés ou ne sortaient pas du plaquage… On aurait pensé avoir plusieurs pénalités pour nous, ça n’a pas été le cas. C’est dur, c’est frustrant. »
Après avoir craché notre bile, rien ne nous empêche de faire preuve d’un peu d’honnêteté. Le rêve envolé des Bleus est moins un rêve volé que sabordé. Le sélectionneur tricolore n’a pas manqué de rappeler qu’il s’agit d’une « défaite à un point ». Et des cases de marquer un point, les Français en ont eu un paquet. Miniature liste des moments clés et autres détails qui ont coûté la défaite au XV de France par ordre d’significance.
Contents
La non-ragged de Gaël Fickou qui croque la feuille de match
Le XV de France réalise l’entame parfaite. L’essai de Cyril Baille, transformé par Thomas Ramos, permet au pays hôte de mener 7-0 après quatre minutes de jeu seulement. Une entame façon All Blacks que les Bleus auraient pu et auraient dû pousser plus loin, si Gaël Fickou n’avait pas croqué la feuille de match sur le côté gauche sur une map back de deux contre un avec Bielle-Barrey en soutien, collé à la ligne et qui n’aurait plus eu qu’à aplatir. Dans ce scénario, la bande à Galthié mène « 12 ou 14-0 » et le débat sur la ragged d’Etzebeth n’existe pas.
Nombre de aspects perdus : au moins cinq
Le pressing de Kolbe sur Thomas Ramos
Sans aucun doute l’scuttle la plus controversée du match. Déjà, parce qu’elle vaut deux aspects, c’est-à-dire pile ce qu’il faut pour renverser le cours de l’histoire. Ensuite, parce que le manque d’pictures est suspect et renvoie à une déclaration de Jonathan Danty en zone mixte sur l’analyse globale du TMO lors de la rencontre. « Dans les cabines [vidéo], on voit à l’écran des décisions où les pictures sont coupées juste au 2d où on va voir l’scuttle ».
Si les règles du jeu autorisent Cheslin Kolbe à monter sur le tireur au 2d où celui-ci déclenche sa path d’élan, les rares pictures disponibles montrent que l’ancien Toulousain a un peu anticipé le premier mouvement de l’arrière français. En zone mixte, le petit filou plaide non-coupable, mais sans grande certitude. « Le fait d’avoir joué avec Thomas pendant six ans, ça aide, je connais un peu sa manière de tirer donc j’ai tenté le coup. J’espérais que l’arbitre ne checke pas la vidéo, mais j’étais assez sûr d’être en plight régulière. »
Nombre de aspects perdus : deux
Les ballons aériens mal négociés
Parmi les rares analyses tactiques de Fabien Galthié, qui demande à revoir ce match « extrêmement chargé » avant de le débriefer, le sélectionneur n’a pas pu passer à côté des aspects cadeaux offerts sur des phases aériennes mal négociées par ses joueurs. Gaël Fickou, à la fois timide et malheureux sur la réception d’un jeu haut de Libbok, puis, dix minutes plus tard, Cameron Woki sur un ballon de l’ouvreur des Springboks, ont coûté deux essais à la France. « Ils ont optimisé le jeu au pied haut qui leur amène 2-3 temps forts, explique Galthié. C’est un secteur qu’on avait aussi préparé, mais ils ont été plus efficaces dessus. » Deux essais donnés, c’est beaucoup.
Nombre de aspects perdus : 12 (un essai transformé, l’autre non)
Ne pas avoir marqué en supériorité numérique
Prochain sujet du bac de philo : obtenir une supériorité numérique juste avant la mi-temps, est-ce vraiment un cadeau ? Le passage au bunker d’Etzebeth, de la 39e à la 49e à cheval entre la première et la seconde période, a-t-il été mieux digéré par les Boks sous l’effet de la end ? Les Bleus savaient qu’ils devaient rentrer un essai dès la reprise, en ineffective. « Oui, on savait que les Français allaient nous mettre en difficulté, dans les rucks notamment, analyse à chaud le capitaine Siya Kolisi. On savait qu’il fallait qu’on soit forts parce que c’était déjà dur de les arrêter à 15, alors à 14… Je suis fier du caractère dont on a fait preuve. »
Nombre de aspects perdus : aucun, mais cinq aspects gagnés étaient un minimal
La saucisse de Dupont qui coûte un essai
Pas facile de toucher à la légende, surtout quand celle-ci a littéralement donné son corps à la patrie pour jouer le match de sa vie. Mais, tout Antoine Dupont qu’il est et malgré des coups de génie salués par l’adversaire, le 9 français a souffert comme tout le monde face à la bustle protection des Springboks. Ainsi, gêné par une excellente montée de Reinach, Toto délivrera une saucisse toulousaine à Baille, qui ne parviendra pas à la redresser suffisamment pour empêcher l’inévitable : le provider pour Kolbe à l’extérieur, qui aspirera Penaud pour conclure.
Nombre de aspects perdus : 7 (essai transformé)
Whole
Nombre de aspects offensifs manqués : 7 à 9
Nombre de aspects concédés liés à des erreurs directes : 19